JdP 18.03.2010

JdP 18 03 10

Pour introduire la soirée d’hier, j’aimerais reprendre le commentaire de Roland Dauxois qui, suite au compte rendu des jeux dits de la poésie précédents a donné son avis et je l’en remercie :
Le plus important à reconnaître c’est l’impossibilité à enfermer la poésie dans une seule définition, pour les uns la poésie commence avec le travail sur la langue, ne peut exister que dans l’expérimentation, pour les autres elle est une urgence à dire, pour d’autres encore inspiration sacrée… Tous ont raison mais tous ont tort quand ils excluent toute forme non conforme à leur vision de la poésie.
On peut dire aussi cela : la poésie est liberté, liberté du langage, liberté du dir , liberté de l’être.
A mon sens, et sans ajouter une autre définition, dans un monde qui accumule les contraintes, les jougs de toutes sortes, la poésie est un souffle essentiel
.”

Voilà, c’est dit et bien dit.
Et les jeux dits de la poésie n’entretiennent pas ce débat sans fin autour d’une définition du mot poésie mais sont bien le lieu où nous entrons de plain-pied en poésie et où nous pouvons réagir à vif sur ce que nous entendons et/ou voyons.

Hier soir fût une belle alchimie pour cela. D’emblée un homme a lu les agréables textes de son épouse, Sylvie Gares. Tuphilou, comédien et slameur connu sous le nom de Mister Goodfull a dit puis slamé des textes de sa composition, Bernard Deglet a lu quelques épisodes de la vie posthume de Dabek Sarieloubal* choisis au hasard par Claude Yvroud poète (quand ça l’arrange) vivant et curieux, en présence discrète et brève. Après avoir donné quelques explications sur ce personnage, Bernard a su entrouvrir une brèche qui nous a amenés (je ne sais plus comment) sur la courbure de l’univers, la loi de Coriolis et la poésie du langage scientifique. Une femme a lu un extrait de Plaie d’Antoine Emaz ce qui a provoqué quelques vives réactions étant donné la teneur du texte (voir ).
Ensuite j’ai lu un ovni plein de malice de Valérie Schléej’ai avalé un oiseau – des textes de différentes poètes réunis par Angèle Paoli pour l’anthologie poétique Terres de femmes et pour finir Edith Azam était comme parmi nous via internet, performance filmée du 14 novembre 2009 pour Le nouveau festival à Beaubourg.



Après cela, il y a eu de fortes réactions.
C’est sûr… on ne reste pas indifférent à cette transe qui traverse Edith quand elle balance cette petite musique qui martèle en elle, quand elle lance cette sonde pour chercher au plus profond de sa tête et de sa chair une langue qui en ressort déca[pit]ée… ah oui, c’est sûr, ça sismographe l’oreille une pareille mise à nue. Moi ça m’en donne des frissons. Quelqu’un l’a comparée à Artaud pour ce qui lui semblait être un jeu scénique (la main qui scande, les mimiques, les yeux à peine clos…) sans trouver puissant le travail de la langue. Et pourtant…
Azam malaxe les mots, ceux du dedans, en sachant qu’une fois dehors ils lui échapperont, alors elle les accompagne avec tout son souffle, sa respiration et ça donne, bien au-delà d’une performance, un uppercut texte/son tel qu’on adhère ou rejette. Face au déplaisir de certains pour la poésie sonore, une jeune poète présente, Pauline Catherinot, s’est lancée dans une courte mais efficace présentation de cette forme poétique.

Artaud ayant été cité, Bernard Deglet a projeté un de ces films discrépants (voir à ce sujet le cinéma de la littérature ainsi que le montage discrépant d’Isidore Isou). La danse du Tuguri a été réalisé à partir d’un extrait sonore d’Artaud tiré de Pour en finir avec le jugement de dieu.

Ces jeux dits de la poésie du 18 mars ont non seulement permis le côtoiement de différentes formes poétiques mais aussi la friction, la discussion, le transport entre chocs, sensations et émotions variés. Merci à toutes celles et ceux qui ont courageusement participé.

*extraits du recueil Dabek se précipite qui en compile 104. Le laboratoire d’où sont tirés ces épisodes est ici.

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ANNOnCES

> Les prochains jeux dits de la poésie auront lieu exceptionnellement un mardi, le mardi 27 avril, afin de permettre à deux poètes montpelliérains d’être avec nous.



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