JdP 18 02 10
Ce soir, les habitués des jeux dits de la poésie ont cédé la place à des personnes que nous n’y avions jamais vues et c’est bien. Mais si un jour nous nous y retrouvions tous ensemble ce serait encore mieux. Les échanges n’en seraient que plus denses, fructueux, peut-être étonnants voire même déroutants.
Au hasard de mes rencontres poétiques, j’ai découvert D.A. Levy auteur d’un texte intitulé Poème sur la mort d’un monastère de banlieue.
Ce texte d’une trentaine de pages écrit en 1968 a fait l’objet d’une création multimédia (lectures, chansons, musique, vidéo, chorégraphie) par CodEx, la Compagnie des Expériences.
J’ai eu envie de partager ce texte pour plusieurs raisons.
D’une part, à la première lecture, j’ai cru qu’il avait été écrit entre les années 90 et aujourd’hui.
“à seulement dix blocs d’ici
des bâtiments ont brûlé – brûlent encore peut-être
la nuit d’août déchirée par les balles des snipers
policiers saignant dans les rues
un tireur isolé se rend (peut-être à court de munitions)
Arme Enrayée ?
…
Je suis fatigué de regarder mes frères
gâcher leurs vies à lutter contre la conscription
pour mourir en des guerres illégales
je suis fatigué d’avoir le coeur déchiré
chaque fois que je vois un de mes frères
remplacé par une étoile d’or dans la fenêtre
je suis fatigué d’écrire & de parler
à des légumes télévisionnaires
immunisés contre les systèmes de réalité multiple
inoculés via les vaccins de propagande des mass-médias
je suis fatigué de lire des choses sur les gens
qui meurent de faim en chine, en inde, dans les ozarks
dans les bidonvilles intérieurs des villes
je ne comprends pas l’économie théorique
mon monde est plein de gens & d’esprits
j’ai envie d’aller là où il y a encore
quelques éclairs de lumière
mon monde est plein de femmes imaginaires
au néon – fleurs électriques de l’amour
je désire aller là où je n’ai pas besoin
de faire semblant de n’être pas seul”
D’autre part j’en aime le rythme, le sujet et la manière de s’en emparer.
J’ai trouvé également intéressant d’aller de David Christoffel (cf. les JdP du 21 janvier 2010) à D. A. Levy. Chacun dans sa langue, universitaire pour l’un, brute de décoffrage pour l’autre, écrit des cascades de mots dans lesquelles parfois sont criées quelques vérités.
Evidemment, à l’écoute de Poème sur la mort d’un monastère de banlieue, il y a eu controverse. Pour les uns c’est un peu facile, pour d’autres c’est de la fumisterie. D’emblée certains ont posé la question “qui dit que c’est de la poésie ? ”
Du coup, il nous a fallu réfléchir encore et toujours à cette question qui heureusement n’aura jamais de réponse, qu’est-ce que la poésie ? Une personne présente a proposé un début de définition : il y aurait poésie quand il y a travail sur la langue. Ainsi pour illustrer cela, cette personne nous a lu un texte de James Sacré puis un texte de Valérie Rouzeau tiré de Quand Je Me Deux. Cependant il n’y a pas eu que des réfractaires à cet ensemble texte-musique qui a aussi su émouvoir.
Puis ont été lus des textes de Wislawa Szymborska et Christophe Tarkos.
Pour finir je n’ai pu m’empêcher, de lire le début de Univerciel de Christophe Manon dont je vous laisse découvrir une note de lecture de Loyan sur Poezibao.
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ANNOnCES
> Les prochains jeux dits de la poésie auront lieu le 18 mars